L'antiquité rêvée au Louvre

Publié le par Rhoda

Edme Bouchardon, L’Amour se faisant un arc de la massue d’Hercule, 1750, Paris, musée du Louvre

Edme Bouchardon - L'amour se faisant un arc dans la massue d'Hercule - 1750 - Musée du Louvre

 

Vendredi dernier, je suis allée au Louvre, rêver l'antiquité avec les artistes du XVIIIème siècle. Ils allaient tous faire leur grand tour d'Italie et y recueillir les influences qui fonderaient leur réflexion et leur art. A l'époque, on commençait les fouilles de Pompéi et d'Herculanum. Ces jeunes gens avaient donc de bonnes raisons d'être plus fortement influencés par l'antiquité que par le baroque romain.


L'exposition du Louvre montre et explique ça très bien. Elle explique aussi qu'au même moment, les gens d'esprit se passionnent pour l'archéologie non plus seulement comme des collectionneurs mais comme des scientifiques et des théoriciens. C'est ainsi que j'ai découvert le comte de Caylus, vieille et noble famille, que Diderot n'aimait guère mais qui eut l'immense mérite de soutenir de nombreux artistes (notamment le peintre Edme Bouchardon dont vous pouvez ci-contre admirer une sculpture à la touchante et grecque simplicité). Il leur fournit aussi de nombreux sujets d'étude et d'inspiration dans son ouvrage Tableaux tirés de l'Iliade, de l'Odyssée d'Homère et de l'Eneide de Virgile. Il veilla  à ce que son tombeau ressemble à celui d'un patricien romain, s'attirant ainsi cette remarque cinglante de Diderot qui partageait pourtant le goût de son siècle pour l'antique:
Ci-gît un antiquaire acariâtre et brusque
Oh, qu'il est bien logé dans cette cruche étrusque.
On peut voir la dite cruche au Louvre, surmontée d'un médaillon montrant le profil impérieux du comte.
Le continuateur plus célèbre de Caylus fut l'allemand J. J. Winckelmann. La vague antique submergeait l'Europe entière.

 


L'exposition souligne combien une même source conduit à des interprétations variées.  Certains adoptent le point de vue de Winckelmann et cherchent dans leurs œuvres "la noble simplicité et la calme grandeur" antiques. En peinture comme en sculpture les gestes sont mesurés, les sentiments vertueux, les lignes droites, les expressions retenues. Ce sont les grands formats de David (ceux qui ornent les manuels d'histoire), les sculptures de Bouchardon, les bustes qu'on se devait de faire réaliser de soi-même ...  D'autres plongent des sujets antiques dans des débauches de courbes, de volutes et de sensualité qui doivent plus au baroque du Bernin qu'aux portiques du forum. C'est ce qu'on peut admirer dans la peinture de Régnault, de Boucher ou la sculpture de Thomas Banks ou d'Adam. Pour d'autres enfin, il m'a semblé qu'ils ne gardaient de l'antique que quelques éléments de décoration, toge ou meuble et s'enfonçaient gaiement dans le symbolisme le plus décadent. 


Ensuite Napoléon ouvrirait un nouveau siècle et une nouvelle mode archéologique. L'Egypte supplanterait la Grèce et Rome. Perle de Rosée disait hier en goûtant la purée violette de pommes de terre vitelottes qu'elle ne comprenait pas qu'existassent des modes culinaires. Il y a des modes en tout mon enfant. Apprends-le.

Publié dans Musées - expositions

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